L’élan & le libre arbitre
Que l’on regarde la théorie actuelle du Big Bang ou celle, ancienne, de la métaphysique indienne Samkhya, on apprend que la création de l’univers a été propulsée à partir d’un point (le bindu, œuf cosmique, magma primordial). Une fois le processus lancé, l’univers se développe et l’on voit apparaître des microparticules de lumière, puis des atomes, molécules, la matière se construit par agrégats, les planètes apparaissent, d’abord gazeuses, puis se condensent, la vie organique apparaît…
De l’explosion primordiale – la création- l’univers a conservé son « élan », cette force qui le pousse à évoluer sans cesse. En effet, aujourd’hui l’univers continue son expansion et l’on a pu observer que des cycles de développement se sont mis en place au cours du temps, faisant d’un apparent chaos primordial un cosmos organisé. Ces cycles seraient des effets relatifs aux trois forces présentes dès l’origine, les trois Mahaguna (Grands Attributs) mentionnés dans le samkhya : création (rajas) /maintien ou cohésion (sattva)/dissolution (tamas). A une échelle cosmique ces forces sont responsables des formations et destructions cycliques des planètes, étoiles, galaxies… A l’échelle terrestre ce sont les saisons, et même à une échelle sociale ou humaine on peut observer les cycles d’une société ou d’une personne : « jeunes », « mûres », « en déclin », puis leur mort inévitable. Ensuite la Nature recycle les « restes » et les transforme en quelque chose de neuf pour un cycle nouveau.
L’élan de l’univers se ressent de partout. C’est la fameuse impermanence : tout bouge, tout le temps. Mais l’homme doute. Il se pose sans cesse – consciemment ou non – la question : dois- je suivre cet élan, ou puis-je m’en extraire ? Et c’est là qu’apparaît tout le questionnement relatif au libre-arbitre.
L’être humain est sans cesse confronté au choix de coopérer ou non avec l’élan de la Nature, de décider de ses actions en fonction des seules impulsions primaires d’une partie de son être ou bien en fonction de tout l’ensemble de sa nature, de la Nature en lui. Par exemple une personne qui mange bien plus que sa constitution physique n’en a besoin va à l’encontre de la Nature en elle, car elle le fait aux dépends du bon fonctionnement de son organisme, de sa constitution, de sa nature. A terme des maladies risquent d’apparaître, et par contagion le déséquilibre va se répandre. A grande échelle cela peut donner un groupe social trop gourmand qui, pour satisfaire ses désirs de nourriture, en affame un autre en pillant ses réserves. Inversement, une personne ou une société qui agit avec respect pour sa nature participera à l’équilibre global de la Nature à plus grande échelle.
La Nature est un équilibre qui se crée et se recrée à chaque instant sur des déséquilibres. En observant le cosmos on remarque bien que son équilibre global est parfait dans l’espace et le temps (absolus), et c’est seulement à petite échelle, dans un temps relatif, que l’on remarque des déséquilibres, momentanés. La Nature se régénère sans cesse et tend vers la perfection. C’est pourquoi elle nous rattrapera toujours, à un moment ou à un autre, si l’on n’a pas suivi son élan. Reprenons l’exemple de la personne qui mange beaucoup plus qu’elle n’en a besoin, un jour ou l’autre elle connaîtra des problèmes de santé qui la forceront à changer son comportement, à comprendre ses erreurs et à les rectifier pour coopérer un peu plus avec la Nature en elle.
Mais l’homme n’est pas que physique, il est aussi mental, intellectuel, spirituel, et la Nature veut s’exprimer en lui à tous ces niveaux. C’est pourquoi il doit apprendre à connaître sa nature, à la respecter, et à en cultiver les dons. Trouver un métier qui lui corresponde, des occupations intellectuelles, des relations sociales, une certaine spiritualité, qui répondent à ses rythmes et à ses attentes profondes.
Finalement, la destinée d’un individu est plus ou moins tracée par l’originalité de sa nature unique, de ses dons, de ses désirs profonds. Mais pour autant, son libre-arbitre lui donne à chaque instant le choix temporaire de marcher ou non sur le fil que la nature a tendu pour lui entre sa naissance et sa mort. Par contre, quelques soient ses choix, la Nature – sa nature – la rattrapera toujours, avec plus ou moins de fermeté…
Le véritable choix de vie qui s’offre finalement ne serait-il pas celui de chaque instant ?
Vivre avec ou sans élan…
Guillaume Chevrier
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La vie est comme une bicyclette. Pour garder l’équilibre il faut avancer
Albert Einstein